Source : Centre for development and entreprises great leaks

Depuis 2004, un projet de loi sur la succession a été préparé, mais jamais voté. La coutume reste, pour l’instant, la seule référence pour trancher des conflits fonciers entre frères et sœurs. Notre collègue Painette Niyongere, chiffres et témoignages à l’appui, démontre que la loi sur succession est une urgence pour que la femme burundaise est accès à la terre foncier.

 

« Les frères de mon époux veulent s’emparer de la propriété foncière qu’il m’a laissée parce que je n’ai mis au monde que des filles », se plaint Médiatrice Nicayenzi, une veuve venue recourir à la justice pour réclamer la terre de son mari. Même son de cloche pour Léa Nshimirimana, une divorcée de la commune Giheta, province Gitega. Ses frères ont invoqué « la coutume burundaise » pour la priver de l’héritage de leur père, décédé quelques années auparavant. Léa n’a plus de terre, et partage actuellement son toit avec sa mère.

 Les cas de Léa et Médiatrice ne sont point inédit. Comme elles, elles sont des milliers à être condamnées à vivre de peu à cause de la coutume qui les prive d’accès à la terre par héritage, et qui est favorisé par un vide juridique de la loi sur la succession.

Vide juridique

Aujourd’hui encore, la loi ne dit rien sur le régime de succession au Burundi. La référence reste la coutume. Pour Christine Nduwayo, une juge du tribunal de résidence de Gitega, « la coutume ne peut pas tout régler. Son interprétation dépend d’ailleurs de la bonne foi des juges, d’où il faut une loi écrite pour éviter les injustices sociales à l’endroit des femmes burundaises », martèle-t-elle.

À part l’absence de la loi sur la succession, même la lettre de politique foncière au Burundi adoptée par le décret n°100/72 du 26 avril 2010 qui trace les grandes orientations du gouvernement du Burundi pour organiser l’accès à la terre, l’appropriation de la terre et la sécurisation des droits y afférents, se montre presque muette par rapport à la problématique de l’accès des femmes à la terre. Nulle part dans la lettre n’est mentionnée le  défi lié à l’accès à la terre pour les femmes.

La loi sur la succession, une nécessité

Comme conséquence de ce vide juridique, la proportion des femmes qui saisissent les tribunaux de résidence pour faire valoir leurs droits fonciers est en constante augmentation. Et les chiffres sont là pour le prouver. En 2009, 38 % des plaignants sur les litiges fonciers étaient des femmes. Les données collectées en 2015 dans les 10 tribunaux de résidence montraient que, sur 1807 litiges fonciers portés devant ces tribunaux pour l’exercice 2014, 877 litiges, soit 49 % ont été introduits par les femmes. Et sur ces femmes ayant introduit des plaintes, 44,9 % se plaignaient contre leurs parentés sur le droit d’hériter et succession sur les terres familiales.

Selon le juge Christine Nduwayo, l’absence d’une loi sur les régimes matrimoniaux et la succession entraîne des hésitations et des spéculations quant à la décision à prendre sur les droits fonciers des femmes. Par-là, elle déplore l’ambiguïté de cette situation qui affecte la prise des décisions au niveau des juridictions.

De ma part, ne pas mettre en place une loi portant code des régimes matrimoniaux, successions et libéralité est synonyme du refus de reconnaître que la femme est le pilier du développement. Par-là, remettre à l’agenda l’adoption de la loi régissant les successions, les libéralités et les régimes matrimoniaux par le gouvernement au niveau de l’Assemblée nationale, est une urgence et une nécessité.

 

 

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